Fraude sociale : qui sont vraiment les grands responsables de la perte de 13 milliards d’euros chaque année ?

publié le 5 août 2025

La ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin a dévoilé, le samedi 2 août, les grandes lignes de son plan de lutte contre la fraude sociale, qui sera débattu à l’automne au parlement. Accès au patrimoine des bénéficiaires des prestations sociales, prélèvement direct sur le compte bancaire en cas de fraude… le gouvernement veut faire de ce projet son cheval de bataille pour réduire la dette publique.

Que représente en réalité la fraude sociale ? Dans son rapport rendu public en septembre 2024, le Haut Conseil du financement de la protection sociale (HCFPS) a estimé le montant de la fraude sociale à 13 milliards d’euros par an. Il y a deux catégories d’arnaques à la Sécurité sociale :

. La fraude aux cotisations sociales des entreprises et travailleurs indépendants qui se soustraient au paiement des cotisations.
. La fraude aux prestations sociales des allocataires, qui perçoivent de manière indue les aides de l’Etat.

Les entreprises, les plus grands fraudeurs

Contrairement aux idées reçues, "la majorité de la fraude sociale ne provient pas des ménages mais des entreprises". C’est le constat que fait le HCFPS, missionné par le gouvernement d’Elisabeth Borne pour produire ce rapport. Plus de la moitié (56 %) des fraudeurs sont des employeurs, autoentrepreneurs ou travailleurs libéraux, qui se dérobent au paiement des cotisations sociales par le biais du travail dissimulé. 34 % de la fraude est le fait des assurés sociaux et 10 % des professionnels de santé. L’organisme gouvernemental déplore à ce sujet que la fraude sociale soit réduite à la "fraude au RSA ou à résidence", ce qui nourrit un "discours anti-pauvres".

La fraude au RSA, une petite part de la fraude totale

En termes de perte financière, l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (Urssaf) est la première victime de la fraude à la Sécurité sociale. "L’essentiel de la fraude" viendrait des 6,91 milliards d’euros de cotisations qui n’auraient pas été versées par les entreprises à cause du travail dissimulé. À noter que les cotisations sociales sont des sommes déduites du salaire brut servant à financer les prestations sociales.

Mettant à mal le mythe des assurés "profiteurs du système", la fraude au RSA représente "seulement" 1,54 milliard d’euros par an sur les 13 milliards au total.

Au sujet de l’Assurance maladie, 1,71 milliard d’euros de fraudes par an ont été estimés. Si plus de la moitié des fraudes détectées sont le fait des assurés (54 %), ce ne sont pas les plus coûteuses. Celles des professionnels de santé représentent plus de deux tiers du montant total de la fraude (1,12 milliard d’euros). Ces derniers sont pointés du doigt pour des pratiques frauduleuses comme la prescription réitérée d’arrêts de travail injustifiés, des fausses prescriptions et factures médicales. C’est notamment le cas de la fraude aux audioprothèses, prescrites sur la base d’une fausse expertise médicale et facturées à l’Assurance maladie.

La fraude fiscale surpasse largement la fraude sociale

Comme la fraude sociale, la fraude fiscale, qui consiste à échapper à l’impôt, est difficile à chiffrer avec précision. Sa fourchette d’estimation va de 80 à 100 milliards d’euros par an. Le constat est clair : les montants détectés des fraudes restent bien en deçà des montants estimés.

Selon le Haut Conseil, seuls 16,7 milliards d’euros de fraude fiscale ont été détectés en 2024 contre les 80 milliards estimés. Pour la Sécurité sociale, ce sont 2,1 milliards d’euros de fraude qui ont été découverts sur les 13 milliards. La fraude à l’impôt est donc nettement supérieure à la fraude sociale.

La Dépêche, par Alexia Low publié le 05/08/2025